Onésime a sans doute entendu cette chanson, chantée pour la première fois par Lucienne Boyer en 1930.

Je l'ai traqué sur trois départements, dans les ports, dans la presse, jusque sur les bancs de la cour d'assises de Nantes. Et même en tentant de trouver des informations sur d'autres - en l'occurrence sur son père, c'est lui que je rencontre à chaque fois un peu plus, là où je ne l'attends pas toujours.

Archives municipales de Lorient, tout juste installées dans le magnifique hôtel Gabriel, sur la trace d'Onésime [Ollicime] Le Livec (1854-1915), le père, employé de l'octroi en 1884 d'après un acte de mariage. Les archives antérieures à 1943-1944 sont très lacunaires du fait des bombardements alliés. Il subsiste néanmoins quelques articles concernant le personnel municipal. Registre du personnel, cote 2 K 4, un Le Livec, Onésime, inscrit à la date du 8 janvier 1912, comme appariteur 3e classe - en gros facteur ou coursier entre les différents services municipaux. Il démissionne le 1er juin 1913. Mais... Onésime, né en 1880, ce n'est pas lui que je cherche ! Encore et toujours le fils. Il était donc encore à Lorient en 1913...

 

Archives municipales de Lorient - Hôtel Gabriel

Alors soudain je me suis souvenue des articles de Ouest-Eclair concernant l'affaire des wagons de Saint-Nazaire, qui s'emmêlaient dans le nombre d'enfants d'Onésime et de sa compagne Joséphine Prat. Trois enfants, quatre enfants, les chiffres alternent. Je n'avais trouvé que trois actes de naissance à Saint-Nazaire, à partir de 1914. Et si... 9 novembre 1912, une certaine Joséphine Prat donne naissance à une petite fille, Yvonne, qui malheureusement décèdera un mois plus tard. Pas de père, pas même mentionné inconnu.

 

Prat n'est pas un nom lorientais, la jeune femme est originaire de Bannalec (Finistère), à une quarantaine de kilomètres de Lorient. Ce ne peut être le fruit du hasard. Onésime et Joséphine se sont connus à Lorient, puis sont partis vivre ensemble à Saint-Nazaire.

Au moins deux de leurs filles se sont mariées, ont eu des enfants, et des petits enfants... Internet permet de tirer facilement les fils. Reste à trouver les mots, pudiques, pour tenter de rentrer en contact avec ces cousins, savoir s'il s'est transmis quelque chose de cet aïeul à la fois commun et hors du commun, si le secret a été enfoui, si certains seront curieux, ou si les plaies sont trop sensibles...

Je suis sortie de l'hôtel Gabriel sous un soleil radieux avec le sentiment que mon aïeul avait eu une histoire d'amour qui avait duré plus d'une dizaine d'années, avec une femme qui n'était pas mon aïeule. Et que c'était peut-être cela, la raison qui l'avait amené à abandonner mon arrière-grand-mère, 12 ans, ses petites soeurs, 10 et 6 ans, et leur mère...

Sources et liens

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