Art. 5
La possession des fiefs chargée du service militaire, s'en trouve aujourd'hui déchargée
La noblesse n'est qu'une qualité accidentelle dans les premiers siècles de la monarchie, l'homme noble, ou le noble homme n'étoit qu'une distinction personnelle, que produisit la vertu reconnue, les sujets libres n'étoient point partagée comme ils l'ont été par la suite en deux classes.
Les conquêtes résultantes de la victoire remportée par le souverain et ses armées, ayant procuré de vastes territoires, le roi en faisoit le partage, et en gratifiait ceux qui avoient été reconnu vaillants dans le combat, en leur distribuant le territoire conquis, à la charge de faire dorénavant le service militaire et les frais de la guerre, à quoi chacun se soumetoit par serment ; voilà l'origine des fiefs qui n'étoient possés qu'à vie, on les nomma bénéfices, et à la mutation de chaque possesseurs, le souverain y nommoit celui qu'il en jugeoit digne. Les femmes incapables du maintient des armes étoient exclues de la possession des fiefs ; les gens d'église quand on leur permit d'en posséder, ce ne fut qu'à la charge du service militaire.
Les choses à la vérité ont changé, ce qui n'étoit originairement qu'une jouissance viagère est resté en propriété. L'histoire apprend le tems de cette révolution, et les gens instruits en connoissent la cause ; mais toujours est-il vrai que la possession des fiefs devroit estre restée grevée du service militaire, les fruits et revenus de ces mêmes fiefs en étant le payement et le dedommagement.
Dans la suite ayant été reconnu que tous les vasseaux et arrière vasseaux convoqués sous le nom de ban et arrière ban quand il s'agissoit de faire la guerre n'étoient plus une ressource suffisante, le souverain a eu recours à un autre expediant, et ca été de faire la guerre par des troupes réglées ; mais si on ose le dire, est-il juste que tous les impos qui pour ces sortes de dépenses ont été et sont nécessaires, soient pour ainsi dire tous sportés par les gens du tiers état dénommés roturiers ; pourquoi les nobles et les ecclesiastiques, qui possedent les plus vastes domaines et les fiefs les plus étendus, n'y contriburaient ils pas, est-ce une dette que les roturiers doivent payer pour eux. SI les nobles disent qu'ils sont restés militaires, ils ne peuvent disconvenir que ce n'est pas à leurs frais, les apointements qu'ils recoivent, les marques distinctives, les pensions, les places, et les grands emplois que le Roi leur accorde, les en dedommagent et au dela, tandis que le soldat roturier ne reçoit pas de quoi vivre.